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vendredi 23 mars 2012

Jan de l'Ors

Jean de l'Ours, personnage du folklore européen (Photo credit: Wikipedia)

Jan de l'Ors / Jean de l'Ours, est l'un des personnages emblématiques du panthéon pyrénéen : ce thème de l'enfant mi-homme / mi-animal issu de l'union d'une femme avec l'ours qui l'a enlevée et qui deviendra rapidement le plus fort des hommes, se retrouve en France, mais également dans de nombreux pays accueillant ou ayant acceuilli la présence de l'ours : Belgique, Tyrol, Transylvannie, Allemagne, Russie, Croatie, Espagne, Québec...

On trouve de très nombreuses versions du conte mettant en scène ce thème. Il en existe plus d'une centaine rien que dans le domaine français.

Jan de l'Ors par Gabriel Baudoin (10 ans)

= Le conte de Jan de l'Ors



Dessin de © Thomas Baudoin.

Il était une fois une femme qui ramassait de la fougère pour la litière de ses vaches. Alors qu’elle était en train de nouer le vieux drap dans lequel elle avait mis sa récolte, elle entendit un craquement de branches. Un ours sortit du bois, l’attrapa et l’emmena.

La femme avait très peur, elle croyait que l’ours voulait la manger. Bien au contraire, il ne lui fit aucun mal. Cependant, elle perdit connaissance.

Quand elle revint à elle, elle se trouvait dans une grotte et l’ours la lèchait. Même si l’ours ne lui faisait rien, elle était bel et bien enfermée. Une grande roche de cent quintaux fermait l’entrée de la grotte et l’empêchait de sortir.

Dessin de © Thomas Baudoin

Cette bête ne lui voulait aucun mal : chaque jour l’ours partait chercher de quoi manger et rapportait tout ce qu’il trouvait : miel, viande, noisettes, myrtilles, mûres, de tout…
La femme s’habitua, par force. Il fallait bien qu’elle s’habitue à cette vie.
Que faire ?

Si bien qu’un jour elle sentit qu’elle était enceinte et qu’elle allait être maman. Alors, elle eut peur. Elle pensait : "Comment sera cet enfant, à qui va-t-il ressembler ? Sera-t-il un monstre ?". De toute façon, elle devait attendre le moment d’accoucher ; elle laissa passer le temps.

Dessin de © Thomas Baudoin

Et un jour l’enfant naquit ; c’était un garçon. Il était très joli, bien fait ; ce n’était pas un monstre, il avait juste une touffe de poils sur le ventre, comme ceux de son père. Elle l’appela Jan parce que son père à elle s’appelait Jan.

Les jours passaient et Jan grandissait dans cette grotte. L’ours s’en allait tous les jours, comme d’habitude il refermait la porte de la grotte avec la grosse pierre de cent quintaux et il partait chercher à manger.

Un jour qu’il venait de partir, un rayon de soleil passa sous la pierre. Jan de l’Ors appela sa mère et lui demanda :
- Maman, viens voir, quelle est cette chose si jolie ?
- Ceci, mon fils, tu ne le verras jamais et moi je ne le reverrai plus, ceci est la plus belle chose au monde, ça s’appelle le soleil.
- Mais oui ! maman on le reverra, quand je serai assez fort pour pousser la pierre, tu verras on sortira d’ici !
- Je ne sais pas si on pourra ; je ne sais pas si tu réussiras, mon fils.

Dessin de © Thomas Baudoin

Le temps passait, l’enfant grandissait, il avait presque la force de son père ; il était fort comme un ours.

Un jour, alors qu’il tentait avec l’épaule de déplacer la pierre, Jan de l’Ors appela sa mère :
– Viens voir, maman, je crois que je la fais bouger !
C’était bien vrai, elle basculait un peu. La femme était contente et le temps passa encore.

Un jour que l’ours, son père était parti, Jan de l’Ors dit :
– Tu vas voir, maman, aujourd’hui je sens que je vais faire rouler la pierre et que nous sortirons.
– Si le Bon Dieu pouvait t’entendre !

Dessin de © Thomas Baudoin

Alors, aussitôt, d’un coup d’épaule il fit rouler la grande pierre de cent quintaux. Libres, enfin, ils s’échappèrent vers le village où était née la femme.

Mais l’ours entendit rouler la pierre dans la forêt, et à grandes enjambées il revint à la grotte. Quand il s’aperçut qu’ils s ‘étaient échappés, il leur courut aux trousses comme un fou. La femme était épuisée. Jan de l’Ors la chargea sur ses épaules et il repartit à toute vitesse.

Ils arrivèrent au village. Là, il y avait bien longtemps qu’on la croyait morte. Son père et sa mère étaient morts de chagrin. Quand les villageois la virent arriver, ils lui dirent :
– Où étais-tu donc passée depuis si longtemps ?

Elle leur raconta son histoire mais personne ne voulut la croire. Ils pensaient qu’elle avait eu un petit avec… qu’elle était partie… et que… Personne ne voulut croire que c’était l’ours qui lui avait fait cet enfant. Ils ne l’acceptèrent pas, ils ne l’aimèrent pas, l’enfant non plus.

Elle le mit à l’école mais il était si fort qu’en s’amusant, il faisait mal aux autres élèves. En les comptant, en les touchant avec son doigt, il les faisait tomber. Et tous pleuraient :
– Jan m’a fait mal !
– Jan est méchant !

Et Jan par ici et Jan par là, sa mère n’en pouvait plus, elle en avait assez de toutes ces plaintes. Et pour finir, un jour, le maître d’école lui annonça qu’il ne pouvait plus le garder parce qu’il provoquait trop de problèmes.

Alors sa mère lui fit apprendre le métier de forgeron. Il était si fort qu’il coupait tout. Le forgeron qui l’aimait beaucoup, en était désolé. Bientôt Jan de l’Ors fut degoûté de cette situation et il dit à sa mère :
– Ecoute-moi, je m’en vais d’ici, je vais aller par le Monde, essayer de gagner ma vie ailleurs. Quand j’aurai fait fortune, je reviendrai.
Sa mère lui répondit :
– Pauvre petit, je ne sais pas moi… Peut-être qu’il vaut mieux que tu t’en ailles parce qu’ici tu ne peux rien faire.

Dessin de © Thomas Baudoin

Il revint voir le forgeron. Il y avait là, posé dans un coin de la forge, un essieu de charrette de neuf quintaux. Il demanda au forgeron de lui faire une canne. Le forgeron refusa, c’était trop dur. Alors Jan de l’Ors prit l’essieu, il en plia une extrémité sur ses genoux pour s’en faire une jolie canne et il partit par le Monde en la faisant tournoyer au bout des doigts.

Il marchait ainsi, en chemin il rencontra un géant qui jouait à la marelle avec une roue de moulin ; il lui dit :
– Tu es très fort, comment t’appelles-tu ?

Dessin de © Thomas Baudoin

– Je m’appelle Arròda de Molin, et toi comment t’appelles-tu ?
– Moi, je m’appelle Jan de l’ors, parce que mon père est un ours.

Arròda de Molin était impressionné par la canne de neuf quintaux. Jan de l’Ors lui dit :
– Veux-tu venir avec moi à travers le Monde ? Nous ferons de belles choses !
– Avec plaisir, répondit Arròda de Molin, et ils s’en allèrent tous deux.

Plus loin, ils rencontrèrent un autre géant qui était en train de faire une route à coups de pied. Celui-là aussi était différent des autres. Il était plus fort que les autres. Il était si fort qu’il brisait les rochers tout menu avec ses pieds et il s’en servait pour empierrer les chemins. Arròda de Molin et Jan de l’Ors lui demandèrent :
– Tu es très fort, comment t’appelles-tu ?

Dessin de © Thomas Baudoin

– Je m’appelle Trenca Montanha, et vous comment vous appelez-vous ?
– Moi, je m’appelle Jan de l’ors, parce que mon père est un ours.
– Et moi, je m’appelle Arròda de Molin, parce que je joue à la marelle avec une roue de moulin.

Trenca Montanha était à son tour impressionné par la canne de neuf quintaux. Jan de l’Ors lui dit :
– Veux-tu venir avec nous à travers le Monde ? Nous ferons de belles choses !
– Avec plaisir, répondit Trenca Montanha, et ils s’en allèrent tous trois.

Un peu plus loin, ils virent un géant allongé dans un champ, il écoutait des bruits. Ils lui demandèrent :
– Tu es très fort, comment t’appelles-tu ?
– Je m’appelle Aurelha Fina, j’écoute le blé germer.

Les autres croyaient qu’il se moquait d’eux.
– Je vous dis la vérité, leur dit-il, j’ai l’oreille si fine que je peux entendre ce que les autres n’entendent pas. Personne ne veut plus de moi parce que j’entends ce que je ne devrais pas entendre et on me chasse de partout. Et vous comment vous appelez-vous ?

Dessin de © Thomas Baudoin

– Moi, je m’appelle Jan de l’ors, parce que mon père est un ours.
– Moi, je m’appelle Arròda de Molin, parce que je joue à la marelle avec une roue de moulin.
– Et moi je m’appelle Trenca Montanha parce que je fais des chemins en écrasant des pierres avec mes pieds.

Aurelha Fina était à son tour impressionné par la canne de neuf quintaux. Jan de l’Ors lui dit :
– Veux-tu venir avec nous à travers le Monde ? Nous ferons de belles choses !
– Avec plaisir, répondit Aurelha Fina, et ils s’en allèrent tous quatre.

Chemin faisant, ils rencontrèrent un autre homme ; ce n’était pas un géant : il était mal bâti, bossu, tout de travers. Ils se dirent :
– Hum, celui-là ne sera pas un bon compagnon pour nous !

Arrivés près de lui, ils virent écrit sur son béret : "j'en ai tué trois d’un coup". En réalité il avait tué trois mouches et il avait écrit cela pour se donner de l’importance.
– Tu es très fort, comment t’appelles-tu ?
– Je m’appelle Tonhut parce que je suis bossu.
– Eh bien, dirent les autres impressionnés, viens avec nous, et ils partirent tous les cinq : Jan de l’Ors, Arròda de Molin, Trenca Montanha, Aurelha Fina et Tonhut.

Dessin de © Thomas Baudoin

Cependant, au bout d’un moment, ils se dirent :
– Il faut savoir qui sera le chef.
– Ce sera le plus fort !
– Si on se mesure au bras de fer, les derniers seront avantagés parce que les premiers seront fatigués. Il vaut mieux jeter la canne ; celui qui la jettera le plus loin sera le chef.

Jan de l’Ors commença. Il fit tournoyer la canne et la jeta très loin. Arròda de Molin, lui, ne la jeta pas aussi loin que Jan de l’ors. Trenca Montanha posa la canne par terre et d’un coup de pied la fit voler, mais pas aussi loin que Arròda de Molin. Aurelha Fina, lui, dit :
– Je n’essaie même pas, je ne peux pas la lever !

Tonhut non plus ne pouvait pas la lever. Mais c’était un malin, un coquin. Il cria aux gens qui se promenaient de l’autre côté du gave :
– Poussez-vous, gens de l’autre côté du gave !
– Que veux-tu faire ? lui demanda Jan de l’Ors.
– Eh bien ! Je leur demande de se pousser pour ne pas être tués par la canne.
– Laisse la canne ici, si tu la jettes là-bas, on ne pourra pas aller la récupérer.

En réalité, Tonhut n’aurait pas pu la soulever de terre, c’était une ruse. Les autres lui dirent :
– Si tu peux la jeter là-bas, cela veut dire que tu es le plus fort.

C’est ainsi qu’il devint le chef. Ils repartirent tous les cinq.

Dessin de © Thomas Baudoin

Ils cheminèrent un long moment. Ils arrivèrent en vue d’un château. Aurelha Fina ne voulait pas rentrer, il entendait…beaucoup de choses. Jan de l’Ors qui n’avait peur de rien dit :
– Nous allons rentrer quand même ! Nous allons voir ce qui passe là-dedans.

Ils entrèrent. La table était dressée, une assiette pour chacun ; ils se mirent à manger. Repus, ils montèrent à l’étage. Il y avait un lit pour chacun.
– Eh bien, dirent-ils, ça ne va pas si mal !

Ils se couchèrent. Dans la nuit Aurelha Fina vint dans le lit de Jan de l’Ors parce qu’il était mort de peur.
– J’ai peur, il s’en passe des choses ici !
– Oh, tu n’es qu’un peureux !
Il le poussa au fond du lit.

Le lendemain matin, ils se levèrent. Devant le château, il y avait quatre chevaux. Avant de partir à la chasse il fallut désigner celui qui resterait pour préparer la soupe. Aurelha Fina refusa de rester, il avait peur. Ils laissèrent donc Arròda de Molin. Il était convenu qu’à midi il devait sonner la cloche pour appeler à la soupe.

Arròda de Molin était en train de faire cuire la garbure dans la cheminée, quand il entendit, derrière lui, une voix qui demandait :
– Monsieur, est-ce-que je peux me réchauffer, je suis morte de froid !
– Bien sûr, lui répondit-il sans se retourner trop occupé à surveiller la soupe. A cet instant, il reçut un terrible coup derrière la tête. Il s’évanouit.

A midi, la cloche ne sonna pas. Les autres, inquiets, revinrent. Ils trouvèrent Arròda de Molin allongé par terre en train de retrouver ses esprits. Il n’avait rien vu, il n’avait entendu qu’une voix.

Le lendemain, Trenca Montanha resta. Il était convenu qu’à midi il devait sonner la cloche pour appeler à la soupe.
Trenca Montanha était en train de faire cuire la garbure dans la cheminée, quand il entendit, derrière lui, une voix qui demandait :
– Monsieur, est-ce-que je peux me réchauffer, je suis morte de froid !
– Bien sûr, lui répondit-il sans se retourner trop occupé à surveiller la soupe. A cet instant, il reçut un terrible coup derrière la tête. Il s’évanouit.

A midi, la cloche ne sonna pas non plus. Les autres, inquiets, revinrent. Ils trouvèrent Trenca Montanha allongé par terre en train de retrouver ses esprits. Il n’avait rien vu, il n’avait entendu qu’une voix. Enfin, Jan de l’Ors dit :
– Je vais rester, moi, pour voir ce qui se passe.

Dessin de © Thomas Baudoin

Les autres à la chasse, Jan de l’Ors était en train de faire cuire la garbure dans la cheminée, quand il entendit, derrière lui, une voix qui demandait :
– Monsieur, est-ce-que je peux me réchauffer, je suis morte de froid !

Il se retourna : c’était une espèce de sorcière !
– Si tu as froid, approche-toi, lui dit-il.

Alors, quand la sorcière s’accroupit, il lui donna un coup de canne de neuf quintaux et il l’envoya s’écraser la figure dans le feu. Puis il la prit par le cou et il alla la pendre à un crochet de boucher.

Il sonna la cloche. Les autres se dirent : "Celui-là, oui, il sonne la cloche". Ils arrivèrent et Jan de l’Ors leur raconta ce qui s’était passé.
– Venez voir !

Il les amena jusqu’au crochet, la sorcière avait disparu ! Mais elle avait perdu du sang et ils suivirent les traces. Le sang s’arrêtait devant un grande pierre plate, ils frappèrent dessus, elle sonnait creux ; ils la soulevèrent et découvrirent un puits.
– Elle ne peut être que là-dessous, il faut y aller, dirent-ils.

C’était toujours pareil, il fallait y aller. Mais qui ?
– Eh bien, j’y vais, dit Arròda de Molin qui n’avait pas peur.
Ils le descendirent avec une corde, une grosse corde et il cria :
– Corde ! corde ! corde !

Dessin de © Thomas Baudoin

Mais quand il arriva à la moitié du puits, il faisait de plus en plus sombre, il eut peur et il cria :
– Remontez-moi, remontez-moi ! Trenca Montanha, à son tour voulut essayer.

Ils le descendirent avec une corde, une grosse corde et il cria :
– Corde ! corde ! corde !

Mais quand il arriva au fond du puits, il faisait de plus en plus sombre, il eut peur et il cria :
– Remontez-moi, remontez-moi !

Tonhut, le chef, demanda à Aurelha Fina, mais il n’en était pas question ! Et ce n’était pas au chef d’y aller.
– Bon, dit Jan de l’Ors, je vais y aller, moi.
Il mit sa canne au creux de son bras et il descendit.
– Corde ! corde ! corde !

Lui, il arriva au fond et il regarda ce qu’il y avait en bas. Il y avait quatre portes dans la muraille, comme des portes de prison. D’un coup de canne, il défonça la première ; derrière, il trouva une jolie demoiselle prisonnière et un sac d’or.
– Mon Dieu, dit-elle, je croyais mourir ici, je n’aurais jamais cru que quelqu’un viendrait me délivrer !
– Eh bien, dit Jan de l’Ors, je vais te sortir d’ici.

Il l’amena au pied du puits, il l’attacha à la corde et il demanda aux autres de la tirer jusqu’en haut. Quand elle fut sortie, Tonhut dit en la voyant :
– Celle-là est à moi !

Jan de l’Ors, au fond continuait son exploration. Il enfonça une autre porte d’un coup de canne. Derrière, il trouva une jolie demoiselle prisonnière et un gros sac d’or.
– Mon Dieu, dit-elle, je croyais mourir ici, je n’aurais jamais cru que quelqu’un viendrait me délivrer !
– Eh bien, dit Jan de l’Ors, je vais te sortir d’ici.

Il l’amena au pied du puits, il l’attacha à la corde et il demanda aux autres de la tirer jusqu’en haut. Quand elle fut sortie, Tonhut, laissant la première demoiselle, dit en la voyant :
– Celle-là est à moi !

Et ainsi montèrent quatre jeunes filles de plus en plus jolies et chaque fois, Tonhut prenait la plus belle.

Dessin de © Thomas Baudoin

Jan de l’Ors, au fond, attachait les sacs d’or qui étaient de plus en plus gros. Tonhut, en haut du puits, faisait toujours la même chose : il laissait le premier sac parce que celui qui arrivait après était plus gros et finalement il garda le plus gros de tous.

A la fin, il appela Jan de l’Ors :
– Il n’y en a plus ?
– Non, il n’y en a plus. Maintenant, remontez-moi !

Alors Tonhut dit aux autres :
– Vous avez bien entendu ? Il n’y a que quatre sacs, il n’y a que quatre jeunes filles et nous sommes cinq. Quand il remontera, il voudra pour lui un sac d’or et une jeune fille et il faudra que l’un de nous s’en passe. Il vaut mieux le laisser au fond.

Il jeta la corde dans le puits ; ils l’enfermèrent avec la grande pierre plate et ils s’enfuirent. Arròda de Molin, Trenca Montanha et Aurelha Fina n’étaient pas très fiers mais Tonhut lui, était une canaille. Ils s’échappèrent et le laissèrent au fond du puits.

Le pauvre Jan de l’Ors vit le puits se refermer. Il était seul au fond. Que faire ?

A force de tourner, à force de chercher, il trouva la vieille sorcière qui se cachait dans un coin. Il l’attrapa.
– Ah ! toi, il faut que tu me sortes d’ici, lui cria-t-il, sinon je t’étrangle !
– Oui, je t’en sortirai, je t’en sortirai, lui promit-elle.

Elle appela un grand oiseau, un aigle blanc qui vivait là et elle dit à Jan de l’Ors :
– Tu n’as qu’à monter sur l’oiseau et quand il te demandera de la viande, tu lui en donneras et il te montera.
Elle lui donna un veau. Et ce fut ainsi.

Dessin de © Thomas Baudoin

L’oiseau volait et Jan de l’Ors était dessus :
- Carn ! carn ! criait l’aigle, carn.

Chaque fois qu’il criait, Jan de l’Ors lui coupait un morceau de veau et le lui donnait.
- Carn ! carn !… et ils montaient, ils montaient…

Ils étaient presque arrivés au bord du puits quand il n’y eut plus de morceau de viande, alors l’aigle descendit tout au fond.

"Ah ! ça ne va pas se passer comme ça", pensa Jan de l’Ors. Il chercha à nouveau la sorcière, et la trouva enfin, recroquevillée dans un autre coin.
– Maintenant, c’est assez ! lui cria-t-il.

Il la prit sous son bras et chaque fois que l’aigle criait "carn", il lui donnait un morceau de sorcière dans le bec. Elle était très dure, cette sorcière, comme un corbeau et l’aigle avait du mal à la mastiquer.

A force, quand il eut fini de manger la sorcière, ils arrivèrent en haut. D’un coup de poing, Jan de l’Ors fit sauter la grande pierre plate et il sortit.

Aurelha Fina avait tout entendu :
– Il arrive, attention, il arrive, il va tous nous tuer !
Les autres n’avaient rien entendu.
– Oh ! penses-tu, peureux ! Il est au fond et il va y mourir ! dit Tonhut.

Mais Jan de l’Ors parvint à les rattraper. Il n’était pas content, pas content du tout !
Il demanda :
– Qui a eu l’idée de me laisser au fond du puits ?
Arròda de Molin, Trenca Montanha et Aurelha Fina ensemble répondirent :
– Tonhut !

Alors, d’un coup de canne, Jan de l’Ors décapita Tonhut et comme celui-ci avait choisi la plus jolie demoiselle et le plus gros sac d’or, ce fut sa part.

Il revint à la maison et sa mère fut heureuse.
– Vois-tu, maman, dit-il, je t’avais promis de revenir. Fortune faite et avec une femme, me voici. Maintenant, nous pouvons vivre heureux.

E cric e cric, mon conte qu’ei finit.
E cric e crac, mon conte qu’ei acabat.


Cette version est issue du livre Jan de l'Ors édité par le CAP'ÒC en 2005 (texte en occitan de Jaqueish Ròth, d'après un conte traditionnel). Les illustrations de Thomas Baudoin sont reproduites ici avec son aimable autorisation.

Voir aussi l'article [Les contes du CAP'ÒC] sur ce site.


= Jan de l'Ors, version du conteur Pèire Potz


Et pour le plaisir, une autre version dite par le conteur Pèire Potz (Pierre Pous) de Munes, (País de Saut - Occitània).



= Autres versions de Jean de l'Ours glanées sur la toile


Et une version "trash" par Gobi goblog, j'adore ;-) 

  • Une version trouvée sur le site Pyrène, l'esprit du pyrénéisme - [pyrene.free.fr].
  • Une autre sur le site Origine Pyrénées - [www.originepyrenees.com].
  • Une version provençale sur le site Pages d'Almanach de Jean-Marie Lamblard - [jean-marie.lamblard.pagesperso-orange.fr].

    Ce conte de Jan-de-l’Ours, un des plus connus de la tradition orale et des plus répandus, me vient d’un vieux paysan du Midi. Il était né en I872 et n’était jamais allé à l’école. Il avait exercé plusieurs métiers : bouscatier, charbonnier, puis berger dans la Crau.

    Alors qu’il était homme à tout faire dans un mas de Camargue, il avait épousé la fille du "baïle des roubines" et tous deux étaient partis achever leur vie dans un village du Gard où ils cultivaient quelques ares.
    Lui s’appelait Marius Lamblard. Il était mon grand-père et parlait provençal.

  • Une version du languedoc-roussillon sur le site Un blog rêveur - [benoitreveur.over-blog.com].
  • La version inédite de Michel Cosem sur le site de Frankie Pain - [lamangou1.blogspot.fr].
  • Et une version mise en BD par les membres du forum Graphimaker trouvée sur Calaméo - [fr.calameo.com].

= En savoir plus sur Jan de l'Ors

  • La fiche de Jean de l'Ours sur Wikipedia - [fr.wikipedia.org/wiki/Jean_de_l'Ours].
  • Le livre [Xan de l'Ours, la légende de l'homme sauvage. Marc Large. Ed. Cairn, 2008] - et le site qui lui est dédié [xandelours.canalblog.com].


    En 1780, autour de Sainte-Engrâce, petit village isolé dans la montagne basque, une inquiétude monte parmi les habitants et les bergers. Tous sont convaincus de la présence énigmatique d’un homme sauvage dans les forêts voisines. Ils portent contre lui les pires accusations.
    Une très vieille légende basque parle en effet d’un être mi-homme, mi-ours, né à a suite du viol d’une bergère par le plantigrade.

    Craignant pour la stabilité sociale de sa région, le gouverneur, lieutenant du roi dans le Pays de Soule, Mesnard de Clesle et le prêtre Haritchabalet établissent un rapport destiné au roi. Intrigué, ce dernier missionne l’un de ses meilleurs naturalistes : Louis Jean-Marie Daubenton.
    Dès son arrivée aux abords des fabuleuses gorges d’Holzarté et Kakoueta, le scientifique se retrouve confronté à une population superstitieuse et mystérieuse.

    Il devra néanmoins retrouver l’homme sauvage, velu comme une bête, et apporter enfin une explication rationnelle à son existence. Il lui faudra comprendre une culture très différente de la sienne, parcourir des paysages fantastiques et surtout démêler une intrigue teintée de meurtres et de disparitions.

    Avec un article sur la mythologie de l'ours - [xandelours.canalblog.com].

  • L'article [J'ai épousé une déesse : les hiérogamies (article complet)] sur le site Lieux secrets du Pays Cathare.
  • Reportage de Punt de Vista (émission régionale en occitan de FR3 Aquitaine) sur le spectacle pour enfants Jan de l’Ors par le collectif ça-i… - [aquitaine.france3.fr/puntdevista].

  • L’histoire est racontée sous trois angles : celui du conte, évidemment, avec Ives Durand, mais aussi celui de l’image avec Coline Hateau, ainsi que celui du son avec Thomas Baudoin.
    Un voyage en terres mythologiques pyrénéennes qui a enchanté les enfants des écoles bilingues du Béarn…


  • Lisez l'article Los amics de Joan de l'Ors sur ce blog.
  • Une version inspirée de la tradition avec les aventures de l'ours Juanico : lisez Nabar l'ours conteur sur ce blog.

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1 commentaires :

  1. cher monsieur merci de votre visite et de ce conte magnifique que j'ai beaucoup conter quand j'étais conteuse je reveindrai vous voir aprs avoir lu votre version et merci de votre générosité

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